Ange @ Gravelines

Ange, 37 ans de vagabondages, repart sur les routes avec un nouveau spectacle après la sortie de leur 32ème album « Souffleurs de Vers ». Dans la continuité des précédents albums, sans atteindre le génie de « Culinaire Lingus » ou de « La Voiture à Eau ». A mes oreilles d’admirateur non-fanatique, il y a du bon et du nettement plus ennuyeux. Mais j’étais tout de même curieux de voir ça en Live, étant donné qu’Ange est clairement un groupe de scène.

La Scène Vauban se situe dans la citadelle de cette petite ville à la frontière entre le Nord et le Pas de Calais. La salle est assez bien faite, on décide, pour une fois de faire le concert assis à l’étage, juste devant sur la gauche. On voit la scène à travers une vitre qui sert de rambarde. J’y reviendrai.
La salle se remplit, les places assises sont toutes prises et la fosse est bien remplie, la moyenne d’âge est quand même assez âgée – c’est pas pour se moquer, juste un constat.
La première partie commence avec 20 minutes de retard, c’est un trio dont je n’ai pas compris le nom – en fait j’ai pas compris un mot de ce qu’il a dit – qui joue du bon vieux rock’n roll des années 60 style Elvis, Little Richard ou Chuck Berry. Pourquoi pas, mais 5 minutes ca passe, au bout de 3/4 d’heures avec l’impression d’entendre 15 fois le même morceau, ça commence à devenir long. Et si vous vous souvenez des extravagances des Forbans, c’était la même chose avec le chanteur / contrebassiste, qui jouait dessus, dessous, la faisait tourner, la lançait… très extravagant. Passons.
Le concert d’Ange débute enfin vers 22h, directement avec un nouveau titre de “Souffleurs de Vers” : “Tous les Boomerangs du Monde”. Morceau pas mal, mais qui rend nostalgique du Ange d’il y a longtemps… le groupe a changé depuis, et leurs compositions aussi. C’est le reproche que j’ai vis à vis de l’Ange d’aujourd’hui: je n’adhère pas à leur compositions, que je trouve dénuées d’inventivité, d’aisance musicale.
Mais en live ça passe. Le charismatique Christian Décamps assure toujours aussi bien son rôle de leader du groupe/gourou des fans. A la guitare Hassan Hajdi est toujours au poste, avec son look de samouraï et son jeu énergique. A la basse, Thierry Sidhoum a troqué sa panoplie de “bassiste des campagnes” du Tour de la Question pour un costume des plus classes, petites lunettes Lennon noires et catogan. Et c’est toujours un excellent musicien, qui fait bien la paire avec le discret Benoït Cazzulini à la batterie. Discret dans le sens vestimentaire, pas dans son jeu au contaire très présent, et toujours aussi nickel. Tristan Décamps assure les claviers et le chant, lui aussi en costume classe avec cravate et cheveux à la Edward Scissorhands. Sans oublier Caroline Crozat, au chant, aux percussions et même à la batterie sur un morceau. Et surtout omniprésente scéniquement. Elle se fait sa place, bien plus que sur le Tour de la Question.

Le gros problème c’est le son. Je pense que c’était largement dû à la place qu’on occupait: une plaque de verre devant nous, un plafond en chapiteau en bois, autant d’ingrédients pour avoir un son très étrange. Sur les morceaux très “rock” – comme “La Gare de Troyes” – on entendait de la bouillie sonore. Déjà que je ne connaissais pas cette chanson, ne rien comprendre ne m’a pas aidé à l’apprécier.
Par contre grand sourire sur le morceau suivant: “Exode” du chef d’œuvre “Au Delà du délire”, que j’espérais voir un jour en live. Rien à redire, c’est magique, le duo basse/batterie fonctionne à merveille, Hassan fait un solo “à la Hassan”, Caroline danse avec un roi spectre… Le meilleur moment du concert pour moi.
On repars sur “Souffleurs de Vers” avec “Dieu est un escroc”. Christian parle plus qu’il ne chante sur le début du morceau, il y a une ligne de synthé minimaliste en fond. On dirait une tentative pour être dans le coup. Ca passe mieux en live que sur l’album c’est déjà ça.
Pendant ce temps, Caroline s’assied pour lire le journal, se lève pour chanter un peu, déchire son journal, fait des boulettes et attaque la foule avec son lance pierre. On s’amuse bien et le temps passe plus vite du coup, ça évite l’ennui.
Nouveau retour dans le passé avec le subtil “Aurealia”, Benoît sort de sa cachette (“Oh on voit le batteur !”) pour jouer des percussions, éclairé par une petite lumière rouge, Caroline s’assied à la batterie, Thierry et Hassan se calment, et Christian interprète ce petit bijou de la grande époque… Un autre très bon moment.
Nouveau morceau totalement inconnu pour moi, assez bruyant, j’ai même pas pas pu discerner une phrase pour faire une recherche Google avec le titre… ca parlait d’un homme animal et Christian nous a exhibé sa bedaine… Marrant mais musicalement j’ai déjà oublié à vrai dire. C’est toujours mieux de connaître un morceau quand on va à un concert, mais 32 albums ca en fait des morceaux à connaître!

Tout le monde part en coulisses pour laisser Tristan et ses claviers et “Les Nouvelles du Ciel”, ballade tristanesque de “Souffleurs de Vers”. Tristant m’impressionne toujours quand il chante, un timbre de voix vraiment à part qui peut agacer à la première écoute. “Harmonie” lors de la tournée précédente était un grand moment, ses interprétations du “Bal des Lazes” de Polnareff sont entrées dans la légende. Mais “Nouvelles du Ciel” c’est autre chose. Aucun reproche au niveau du chant, c’est Tristan. Mais le texte gâche tout. Moi qui accorde autant d’importance au texte qu’à la musique, je suis très déçu par ce morceau: je trouve qu’il manque de finesse, de poésie. C’est limite celinedionesque. Qui aime bien châtie bien, même si je sais que c’est totalement subjectif.
C’est au tour de Caroline de faire “son” morceau. Et accessoirement mon préféré de “Souffleurs de Vers” : “Coupée en Deux”. Comme à son habitude, Caroline ne se contente pas de chanter ce titre, mais elle l’interprête de tout son corps. Excellent en live, avec l’accompagnement calme qui va crescendo. On en redemande.
Et un autre titre inconnu pour moi, dont je n’ai pas non plus saisi les paroles. Je crois que ca parle d’un fou, Christian en l’occurrence, qui a trop bu et tente de marcher droit sur la scène alors que Caroline le mène à la baguette de majorette. N’ayant rien compris aux paroles, forcément des subtilités doivent m’échapper.

Un titre plus intéressant de “Souffleurs de Vers” avec “Les Beaux Restes”. Morceau dynamique sans tomber dans le “riff-sur-riff”, avec Christian et Tristan au chant, celui-là c’est mission accomplie, il marche très bien.
Les angelots partent en coulisses pour se faire désirer, et reviennent pour les rappels. Christian s’amuse à frustrer le public, en expliquant que tout le monde doit se dire “Ah j’espère qu’ils vont jouer ça ou ça…”, que lui faisait ça quand il allait voir Yes quand il était jeune – déjà là il me frustre – et il a réussi son coup en disant “Par exemple, ca serait bien qu’ils jouent “Ode à Emile”… et de reprendre deux secondes plus tard “Mais on le fera pas”. Fausse joie immense, mais je me marre de bon cœur, je me suis fait avoir en beauté. Il réitère le jeu à propos de “Hymne à la Vie”, mais là je ris moins parce que je le voulais vraiment celui-là. Et je rigole plus du tout quand il dit “Fallait venir y’a trois ans, sinon, ben, dans le cul” et que faut jouer des morceaux qu’ils ne jouent pas souvent.
Une réflexion s’impose : est-ce qu’Ange se considère suffisamment aimés de leur public de cinquantenaires, ou est-ce qu’ils sont ouverts aux nouvelles générations ? Personnellement, j’ai trouvé ça limite irrespectueux, du genre “t’es trop jeune vas te coucher”. Il y a les imbibés qui ne jurent que par Christian Décamps (jusqu’à mettre sa tête sur les tickets pour acheter des sandwiches, si c’est pas du culte de la personnalité, qu’est-ce que c’est…) et il y a ceux qui sont arrivés après, qui ne comptent pas. Quel dommage qu’ils vivent leur aventure angélique en autarcie, la partager serait tellement plus agréable, et surtout, cohérent avec l’image qu’ils veulent donner.

Mais bon, il y aura toujours des gens pour dire “Non les vieux titres on les connait par cœur” ou “Non faut jouer les classiques je viens pour ça” et dans tout les cas il y aura des mécontents. J’en suis sur ce coup là, même si j’aime bien “Le Soir du Diable”, composé sur une des plus belles plages du sud de la France à Calais…
Et “Les Noces”, avec Christian en veston et haut de forme, c’est pas mal, enfin surtout le début, la seconde partie étant moins inspirée à mon goût. Sur scène c’est du grand n’importe quoi quand la fameuse “pucelle falsifiée” entre en scène sous forme de poupée gonflable, et que M. et Mme Ange (Caroline et Christian) présentent leur fille sur un podium en riant de façon mondaine… c’est Ange ! Mention spéciale à Benoît, qui a assuré admirablement.
Le final sur le plus récent “Ballon de Billy”, que je ne supportait pas avant, et que j’apprécie beaucoup maintenant. Un refrain entraînant, une chanson pop sur un texte pas drôle, Christian qui hurle “Billy”, ca rend bien.

 

Bilan: j’aime pas les Critiques payés pour massacrer des artistes. Et quand je me relis j’ai l’impression d’en faire partie (sans être payé). Alors que c’est absolument pas mon but, Ange est un groupe passionné, passionnant, mais qui a ses défauts. Je pense être plutôt bon public, si vous lisez les autres compte rendus de concerts, je pense que ça se vérifie. Mais une fois de plus, qui aime bien châtie bien. Pour moi c’était un concert en demi teintes, de bons moments (Exode, Aurealia, Coupée en deux, Les Beaux Restes, Les Noces…) des nettement moins bons (La Gare de Troyes, bruyant et peu entraînant, Les Nouvelles du Ciel, qui m’ennuient, Dieu est un Escroc, les titres inconnus qui m’accrochent pas du tout…), mais ça ne m’empêchera pas de retourner les voir, qui sait pour pêcher un deux vieux titres.

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Commentaires 5
  1. Merci pour ce compte rendu qui me semble bien refléter ce à quoi on doit s’attendre à un concert d’ANGE.
    Fan de la première heure (concert sous chapiteau en 72) je renoue avec le passé et viens de réserver mon billet pour le concert de Paris en mai.
    J’écoute en boucle le dernier album mais n’accroche pas du tout.
    Je serai donc la pour entrendre quelques vieilleries si possible.

  2. le son de ANGE était énorme à l’Olympia avec le systéme Produc’Son (JBL) j’ai demandé à l’Ingé son !
    cordialement et continuez trés longtemps à hissé très haut le niveau de la chanson française de qualité

  3. Bonjour,

    Je viens de voir ANGE en concert et j’y retourne aussitôt ! Quelle claque ! Le groupe a une connivence musicale et une puissance qui vous cloue sur le siège et vous donne des frissons !
    J’adore leur dernier album !
    Ecoutez le titre éponyme, sa fin grandiose, puis le retour au calme avec le dernier morceau…. on se demande ce qui arrive !
    Un must (pour moi et d’autres)!
    Alain

  4. Félicitations à l’Ingénieur du son façade (F.O.H) pour le magnifique son de ANGE (avec le systéme JBL VERTEC je crois..) dans les Vosges ce mois de mai 2009.
    Et, quel bon groupe mythique, ça sonne fabuleusement bien, les texte, les mélodies, tout est léché, du grand travail.

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