Iarla Ó Lionáird est un chanteur traditionnel irlandais, perpétuant la tradition familliale du Sean Nos. Il s’agit du chant quasi a capella, issu de 3000 ans d’histoires. Iarla Ó Lionáird est né à Cuil Aodha, un petit village au sud de l’Irlande. Dans ce village, tout le monde chante, chaque famille a ses petits secrets, et la vie est une musique.
“Il y avait des chanteurs partout. […] Vous pouviez fermer vos yeux et savoir de quelle famille est une personne rien qu’en entendant sa façon de chanter. [..] Quand ils mourraient, vous chantiez pour eux, quand ils naissaient vous chantiez pour eux et quand ils se mariaient vous chantiez pour eux. Le chant marquait les passages de la vie.”
Iarla est donc issu d’une famille de chanteurs. Et de chanteuses puisqe sa mère, sa tante et sa grand-mère étaient toutes trois très connues.
Il a appris le chant avec Sean O Riada, fondateur des Cheiftains, s’impliquant encore plus que n’importe quel autre enfant du village. Il plaçait la musique au dessus de tout dans la vie.
“Le chant peut être un don, mais c’est aussi un métier. C’est difficile. Cela demande des efforts rituels, une dévotion pendant une longue période.”
Lorsqu’il part à Dublin pour étudier la littérature et pour finalement devenir professeur, il a l’impression que sa musique n’est pas à sa place, qu’on ne peut pas l’exporter de Cuil Aodha, et commence à se faire une raison. Mais lorsque que l’accordéoniste Tony McMahon l’invite à l’accompagnier lors d’un concert à Armagh, il ressent la musique en lui, plus présente que jamais.
Quand il entend pour la première fois “Passion” de Peter Gabriel, il prend son plus beau papier à lettres et redige 6 pages, accompagné d’une cassette, qu’il expédie aux studios Real World.
La réponse ne tarde pas et il est invité aux studios, ou il fait la connaissance de Simon Emmerson: il veut monter un groupe mélant musiques celtiques et africaines. Iarla Ó Lionáird est immédiatement recruté.
AfroCelt Sound System, rebaptisé Afrocelts, ont sorti 5 albums chez Real World, tournant dans le monde entier. La musique de Cuil Aodha a franchi les barrières musicales. Iarla compte parmi ses admirateurs sa compatriote Sinead O’Connor, Bono, Nick Cave et surtout Peter Gabriel, qui l’invite à chanter sur son album OvO.
Iarla a sorti deux albums solo chez Real World “Seven Steps To Mercy” et “I Could Read The Sky”, bande originale du film du même nom.
En 2005, il a sorti son troisème album en solo, enregistré chez lui, dans la campagne Irlandaise.
Autant son premier album était très “a capella” et par moment assez froid, autant celui si s’écoute avec fascination.
Les compositions de Iarla cotoîent des chants traditionnels, issus du folklore ou de sa famille. Le thème de la nature est la pièce maîtresse de cet album. D’après Iarla, il s’agit en partie de la victoire de la nature sur les religions, et d’autre part un travail plus “archéologique” sur ses racines.
Il joue de quasiment tout les instruments sur cet album, et comme il le dit “Il n’y a rien dessus que je ne voulais pas”.
“A Nest Of Stars”, inspirée par le pouvoir qu’a la nature sur les enfants, est l’une des plus belles chansons de l’album. Une superbe ouverture qui s’enchaîne sur le chef d’oeuvre “Cu-Cu-In”, un chant traditionnel arrangé à la sauce Iarla. On ne peut pas dire moderne, à cause de tout ce que ce terme a de péjoratif dans ce contexte.
“Taimse Im? Chodladh”, ce qui signifie, “Je suis endormi” est un autre texte traditionel, déniché dans des archives de 1920. Le Sean Nos dans sa splendeur.
“I’m weary of lying alone”, dans la continuité de “Cu-Cu-In”, un autre poème a capella inspiré par la tante de Iarla.
Vient ensuite le morceau le plus accessible aux oreilles inhabituées au chant de Iarla. Il s’agit d’une de ses compositions “The Day That You Were Born”, écrit pour sa fille. Il y raconte comment un adulte croit éduquer un enfant alors que c’est l’inverse qui se produit. Un superbe texte, traduit dans le livret, avec une belle montée en puissance émotionnelle, passant de la mélancolie à la joie.
“An Buachnailin Ban” (Le cher enfant irlandais) est un chant triste, accompagné par une guitare. Très émouvant.
“Oisin’s Dream” est une expérimentation, avec des crescendo à la “A Day in The Life” des Beatles. Au niveau atmosphère, c’est bien, mais à écouter, c’est moins agréable…
“Tuirimh Mhic Fhinin Dhuibh” est une complainte qu’il chantait dans la chorale pendant son adolescence, un chant très puissant avec des prouesses vocales aussi bien dans les graves que dans les aigus.
“Aurora” est un morceau plus étrange, assez expérimental, inspiré par un poème de Seán Ó Ríordáin, originaire de la région de Cuil Aodha. Des voix chuchotées, une autre qui parle, de discrètes nappes de synthétiseur, quelques notes au piano, et la voix de Iarla qui s’élève au dessus de cet ensemble nous plongent dans une ambiance particulière.
“Scathán Na Beatha” clôt l’album, sur les sons d’oiseaux dans la nature. Un morceau dans la lignée du précédent, ou on peut entendre la voix des parents de Iarla lorsqu’il les avait enregistré sur la radio familiale. Très émouvant, très beau.
Iarla Ó Lionáird nous fait découvrir une autre musique irlandaise, loin des cornemuses et autres gigues endiablées. Il nous chante ses racines, son pays, et sa profonde admiration pour la puissance de la musique, perpétuant la tradition ancestrale du Sean Nos. Une des plus belles voix au monde.