Roger Waters Lille
Logo de la salle de concert Stade Pierre Mauroy

Roger Waters @ Lille

Roger Waters, “l’âme et le génie créatif de Pink Floyd” est en tournée mondiale avec son spectacle “Us and Them” et, ô miracle, il passe à la maison, à Lille !

J’avais des a priori pas forcément positifs après avoir lu quelques retours d’autres concerts de la tournée: ça parle de playback, d’un Waters moralisateur à l’extrême, voire même d’anti-sémitisme. J’attendais plus d’une éventuelle accréditation photo que du concert en lui-même en fin de compte. Et au final, je n’ai été déçu ni par l’un, ni par l’autre.

L’accréditation photo était inespérée, mais un mail me prévenant que je l’avais eue est arrivée samedi matin. Pour entrer dans le stade proprement dit, ce fut plus compliqué, la sécurité ne plaisantant pas avec les autorisations pour pénétrer dans le stade. Deux minutes avant le début du concert, j’accède enfin à la zone réservée pour les photographes. En fait, c’est deux minutes avant le début d’une vidéo projetée qui a duré… 20 minutes. 20 longues minutes pendant lesquelles on regarde une femme de dos, sur une plage, face à la mer. Parfois on croit qu’elle va se lever, mais non. Au bout de vingt minutes, on entend des chœurs féminins psalmodier, puis le ciel se teinte de rouge, et enfin, le concert commence, sur l’attendu “Speak To Me / Breathe”.

Concernant le groupe qui accompagne Roger Waters, beaucoup de changements depuis la tournée “The Wall”. Aux claviers on retrouve Jon Carin, et à la guitare Dave Killminster. Le reste du groupe a changé, pas toujours pour le meilleur selon moi, surtout en ce qui concerne le second guitariste / chanteur, la batterie que j’ai trouvé moins présente, et les choristes… un peu flippantes, j’y reviendrai.

Au deuxième morceau, le top est donné pour les photographes accrédités qui ont le droit de shooter pendant les titres 2,3 et 7. Il s’agit de ” One Of These Days “. Etant occupé à shooter à quelques mètres de Waters, je n’ai pas pu apprécier le morceau qui est pourtant un de mes préférés de Pink Floyd. Waters se paye le luxe de caser un solo de basse avant l’explosion finale… solo qui n’a pas brillé par sa virtuosité, c’est Waters, pas Claypool ou Pastorius.

Le groupe enchaîne sur un autre classique avec “Time” que j’ai trouvé particulièrement bon. Les choristes, les deux chanteuses qui forment le groupe Lucius, en tenue noires et arborant des perruques blonde platine au carré, me font penser à des androïdes. Elle jouent des percussions face à face sur le côté de la scène sur l’intro, pendant que Joey Waroncker fait le vrai boulot aux percussions, emblématiques sur ce titre.

Les photographes sortent prestement du devant de scène, escortés par la sécurité qui ne plaisante vraiment pas. Le groupe joue “The Great Gig In The Sky” qui m’a semblé très froid. Tout repose sur l’interprétation des choristes sur ce titre, et j’ai eu l’occasion de voir des reprises beaucoup plus émouvantes, ne serait-ce qu’avec Australian Pink Floyd.

Le stade résonne ensuite des bruits mécaniques de “Welcome To The Machine” et là… c’est une excellente ré-orchestration que nous livre le groupe de Waters. Le titre est dépoussiéré avec tact, plus rock, en conservant les projections de Gerald Scarfe sur l’écran pour mettre dans l’ambiance. Je suis tellement dans le morceau que j’en oublie que c’est le sixième et qu’au suivant, il faut reprendre le sac photo.

Le suivant, c’est “Pigs On the Wing”, euh non, pardon, c’est “Déjà Vu” du dernier album solo de Waters, qui porte vraiment bien son nom. L’album n’est pas mauvais en lui même, mais l’auto-plagiat sur Pink Floyd au niveau des musiques s’entend un peu trop. Côté textes, c’est du Waters pur jus, obsédé par les guerres, et le proche-orient en particulier. Il est à la guitare acoustique sur ce titre qui, même s’il ne brille pas par son originalité, n’est pas mauvais. A noter que vocalement, comme sur l’ensemble du concert, Waters est plutôt bon compte tenu de ce qu’on est en droit de s’attendre. Je n’ai pas noté d’utilisation flagrante de playback comme c’était le cas en 2011, même s’il doit y en avoir par moments.

Le temps d’être escorté à l’extérieur, de rendre mon pass-photo (oui, il y aurait des trafics de pass !), de courir à l’autre bout du stade déposer mon sac à la consigne, de refaire la face nord pour accéder à ma place, j’ai manqué “The Last Refugee” et “Picture That”, issues elles aussi de “Is This The Life We Really Want ?”, et le groupe est en train de jouer “Wish You Were Here”. Et Gilmour manque clairement. Dave Killminster fait un très bon boulot à la guitare, mais alors le chant de Jonathan Wilson, je ne peux pas.

On reste dans les classiques avec l’immanquable “The Happiest Days Of Our Lives / Another Brick In The Wall” : ce morceau, qu’on connait un peu trop, était tout de même extrêmement bien joué ce soir: le groupe le joue bien rock, les enfants sur le refrain, c’est du déjà vu sur la tournée précédente, mais l’enchaînement direct sur le “Part 3” est bienvenue, et très bien jouée. Waters nous laisse 20 minutes d’entracte sur le thème “Resist”, motto de la tournée. “Resist What ?”… puis défilent toutes les causes, allant de Julian Assange à la pollution des océans, en passant bien sur par le conflit israelo-palestinien. On se dit que la seconde partie va être beaucoup plus politique.

Au bout de 20 minutes, perpendiculairement à la scène, dans toute la longueur de la fosse, une barre avec des lumière d’alertes rouges descendent, puis des projections l’habillent, formant la fameuse Battersea Power Station. Visuellement c’est génial, cela ajoute une dimension inattendue dans un concert.

Les choses sérieuses commencent, il s’agit donc d'”Animals”, sans doute un album dans mon top 3 de tous les temps. Et les sons de “Dogs”, en quadriphonie, nous entourent. Une version magistrale – excepté le chant de Jonathan Wilson – de pas loin de 20 minutes, avec un passage peut être dispensable pendant le solo de mellotron où Waters délaisse sa basse pour jouer le cochon, alors qu’un mouton servile dresse une table et sert du champagne. Waters brandit  une pancarte “Pigs rule the world !”, arrache son masque puis lève une autre pancarte “Fuck The Pigs”, acclamée par le public, alors qu’il continue visiblement à jouer le cochon, sifflant sa coupe de champagne face au public, avant de jeter négligemment la coupe. Le message n’est pas très clair…

I gotta admit that I’m a little bit confused
Sometimes it seems to me as if I’m just being used

Dave Killminster est irréprochable, tout comme le reste du groupe. Seules les Lucius, qui s’excitent sur des toms de batterie devant elles, me laissent perplexe.

Après ce chef d’œuvre, eh bien, on reste dans Animals avec cette fois “Pigs” qui, à mon sens , perd son sous-titre “Three Different Ones” sur cette tournée: le morceau est centrée sur la cible facile qu’est Donald Trump, comme s’il était encore à prouver qu’il était un clown… Trump par-ci, Trump par là, montage façon Terry Gilliam de Trump sur un cochon, projection de tweet surréalistes signés Trump, et conclusion finale “Trump est un porc”… oui, on a bien compris…
Derrière la mise en scène cependant, le morceau reste parfaitement orchestré et exécuté: j’ai la moitié de mon album préféré en live, c’est génial.

On reste dans le message politique avec “Money”. Les projections nous montrent les puissants de ce monde: Trump, encore, Poutine, May, d’autres moins à jour comme Berlusconi ou, pour nous français, les le Pen père et fille… on aperçoit Macron sur des images d’un G8, mais rien de plus. Pas d’autoportrait du businessman en îles privées qu’est M. Waters, mais bon…

Après “Trump est un porc” nouvelle démonstration un poil démago sur “Us and Them” : la pauvreté, ça craint. Je suis un peu amer, sans doute, mais je trouve toujours dérangeant la façon de faire de Waters, riche comme un état.
Reste qu’outre les images qui nous distraient de la musique, la morceau reste très bien exécuté une fois de plus, et le chant de Wilson passe mieux.

Sur “Smell The Roses”, nouvelle dénonciation: “Les drones ça craint”. L’ambiance est très sombre, Waters est mis en scène enchainé les bras en l’air, sur l’écran on nous raconte l’histoire tragique d’une mère et de son bébé. S’il n’y avait pas eu les messages d’avant cela serait sans doute mieux passé, la mise en scène étant très bien produite.

L’écran perpendiculaire se rétracte, pour cette fois faire appel à une nouvelle mise en scène spectaculaire: la pyramide de Dark Side Of The Moon gigantesque formée par des lasers. Sur scène, c’est le morceau qui sent la fin, “Brain Damage / Eclipse”. Encore une fois c’est du grand art.

Waters prends ensuite le micro pour nous présenter son groupe, et enchaîner sur le moment de trop à mon sens. Il nous explique longuement sa position vis à vis d’Israël, qui massacre des civils désarmés déjà enfermés dans leur territoire ceinte d’un mur, interpelle le public pour demander pourquoi l’union européenne et les états unis ne condamnent pas ces actes (qu’est-ce qu’on en sait nous ?), apporte son soutien au mouvement BDS… C’est un peu long et même si dans le fond, je trouve l’intention louable qu’un artiste soit engagé, la forme, peut être due à l’image que j’ai de Waters, me gène un peu.

C’est enfin le rappel, lui aussi sans surprise avec “Comfortably Numb”. Les solos se Killminster sont irréprochables, le chant de Jonathan Wilson… bon vous avez compris, j’ai pas aimé.

Roger Waters maîtrise la mise en scène nul doute la dessus. Sans atteindre la mise en scène de la tournée The Wall, le deuxième set est à ce titre une réussite. Son message politique prend un peu trop de place par moments, mais ce qu’on entend, joué devant nous, c’est l’œuvre de Pink Floyd, avec tout ce qu’elle comporte de qualités intemporelles. On ne verra plus le vrai Pink Floyd sur scène avec la disparition de Rick Wright, donc apprécions les séparément, même si dans le cas de Gilmour, je n’ai toujours pas réussi à le voir en concert. Nick Mason à même remonté un groupe pour jouer les premiers album de Pink Floyd, cette œuvre reste vivante, portée par leur créateurs, profitons en.

 

Roger Waters à Lille : la setlist

Set 1:
Speak to Me
Breathe
One of These Days
Time
Breathe (Reprise)
The Great Gig in the Sky
Welcome to the Machine
Déjà Vu
The Last Refugee
Picture That
Wish You Were Here
The Happiest Days of Our Lives / Another Brick in the Wall Part 2 et 3

Set 2:
Dogs
Pigs (Three Different Ones)
Money
Us and Them
Smell the Roses
Brain Damage / Eclipse

Rappel:
Speech moralisateur
Comfortably Numb

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