Roger Waters The Wall Paris
Logo de la salle de concert Palais Omnisport de Paris Bercy

Roger Waters The Wall @ Paris

The Wall. LA tournée mythique de Pink Floyd, suivant la sortie de l’album mythique, et précédant l’adaptation, tout aussi mythique d’Alan Parker au cinéma. Un thème fort, sombre, dérangé, mégalo, un tube interplanétaire, certaines des meilleures compositions du groupe… The Wall ne manque pas de qualités. La tournée, gigantesque de part ses ambitions en 1980, n’était passée que par 4 villes dans le monde. Cette année, à 67 ans, Roger Waters reprend le spectacle dans le même esprit qu’à l’époque, quelques Pink Floyd en moins et des effets visuels en plus.

On arrive aux alentours de Bercy vers 16h15, pour découvrir une file déjà conséquente. T-shirts noirs de rigueur, à l’effigie de Pink Floyd ou de la tournée actuelle. Il fait très chaud, et l’attente est longue jusque 18h15 quand les portes de la fosse s’ouvrent enfin. On entre dans la salle, et on découvre le Mur, pas entièrement construit bien sur, mais ça fait déjà quelque chose. On se place proches du devant de la scène, un peu sur la droite. On jubile, on y est enfin, nous sommes tout près ! Reste encore pas loin de 2 heures d’attente, aux sons de Bob Dylan, des Beatles ou de John Lennon (“Mother” collait particulièrement à l’ambiance du show je trouve, et la fosse qui chantent sur le refrain d'”Imagine” c’était très beau aussi).

Les gradins se remplissent, lentement mais sûrement, jusqu’à un Bercy comble. A 20h15, ça y est. Les lumières s’éteignent, des hommes en noir, bérets noirs, casquettes noires et brassards rouges investissent la scène. Certains brandissent de grands drapeaux à l’effigie des marteaux. Deux d’entre eux soutiennent la poupée de chiffons à l’effigie de Pink, et l’exécutent sur scène, le ton est donné.
Les lumières nous aveuglent pendant que les guitares nous assourdissent. Des feux d’artifices sont lancés au dessus de la scène, des effets pyrotechniques embrasent le mur, et un Roger Waters tout sourire apparait sur scène. C’est “In The Flesh”, et on ramasse notre mâchoire. C’est un spectacle prenant aux tripes, l’histoire de “The Wall” nous habite depuis si longtemps que voir ça, en vrai, à quelques mètres de nous, c’est quelque chose. Waters aussi n’est pas mécontent de l’effet produit. Même si c’est un show mégalo – on ne saurait lui reprocher, c’est le but – son regard est profondément humain. C’est une chose que j’avais déjà remarqué lorsque nous l’avions vu au même endroit mais depuis les gradins pour la tournée “Dark Side” en 2007, il regarde son public. C’est toujours mieux que de cracher dessus.
Ca continue avec “The Thin Ice”. Ron Carin, le clavieriste, assure le chant en lieu et place de Gilmour sur l’original, et, ce n’est plus un scoop, depuis la séparation du groupe et les tournées solo de Waters ou Gilmour, l’un des deux manque toujours et ça s’entend. On fera avec…

Le mur sert d’écran de projection, tout comme l’écran circulaire au fond de la scène. sur “The Thin Ice”, Waters ne recule devant rien pour faire passer son message, hélas toujours d’actualité : des images de soldats, d’enfants, puis de soldats portants des enfants morts… pas très réjouissant, et peut être un peu trop larmoyant, mais c’est un parti pris de la part de Waters, qui veut actualiser son message, et se sent plus américain qu’anglais maintenant.
Le groupe est derrière le mur, au fond de la scène, et, même si par la suite, ça sera pire mais c’est la règle du jeu, c’est un peu frustrant de ne pas bien voir les musiciens.

“Another Brick In The Wall” première partie, puis suivi par le tube Pink Floyd “The Happiest Days Of our Lives” et la deuxième partie d'”Another Brick”: le mur est en gris et rouge, tagué de slogans révolutionnaires, une gigantesque marionnette du professeur dessiné par Gerald Scarfe se déploie sur la droite de la scène, ses yeux comme des projecteurs rouges et blancs. Grandiloquant ? Peut être, pour qui ne s’imprègne pas de l’histoire, mais à nos yeux, il s’agit plus de nostalgie et de mythologie floydesque. Un hélicoptère passe au dessus de nous, du moins on l’entend clairement grâce à un son quadriphonique exceptionnel. Enfin, une vingtaine d’enfants arrivent sur le devant de la scène pour scander le refrain avec le public et Waters, face au prof. Plein les yeux, plein les oreilles.

Les hommes en noirs, imperturbables, construisent le mur au fur et à mesure…
Roger revient sur le devant de la scène et nous parle, en anglais et en français. Très détendu, très confiant, et il nous explique qu’ils vont jouer “Mother” avec un jeune Roger de 1980, dont ils ont retrouvé les images d’un des concerts originaux donnés en 1980. C’est donc du duo / playback / spatio-temporel.
“Mother” est donc encore un grand moment, avec une autre marionnette géante dans le fond, derrière le mur cette fois ci: c’est la mère de Pink telle qu’on la voit dans le film. C’est énorme.

Pour “Good Bye Blue Sky” le groupe et Waters s’effacent pour mettre en avant les projections sur le mur, réalisées dans le style du film, bien que ce ne soient pas les mêmes… des avions bombardent des symboles chrétiens, juifs, musulmans, capitalistes et même Shell et Mercedes… il fallait oser. Le mur se tâche de sang jusqu’à en être totalement recouvert.

Pour “Empty Spaces”, retour aux images issues du film jusque “Back To The Wall” avant d’enchaîner sur “The Young Lust”. Cette fois le mur sert de support à des clips de jeunes femmes fort peu vêtues. Musicalement, disons que ce n’est pas mon titre préféré de Gilmour, mais ça ça rendait plutôt bien en fait.
“One Of My Turns”, enchaîné avec “Don’t Leave Me Now”, deux titres pas faciles à chanter, mais que Roger a interprété avec brio. Un peu trop parfaitement d’ailleurs pour qu’on ne suspecte pas un artifice du genre playback… Il s’avère que c’est le cas tout le long du concert, et Waters est devenu un maître en la matière, je n’y ai vu que du feu. Discutable, mais là encore, on est plus face à un spectacle qu’à un concert.

Le mur est quasiment fini maintenant, on aperçoit encore un peu le groupe dans des zones volontairement vides, mais tout s’accélère sur la troisième partie d'”Another Brick In The Wall”, dont la mise en scène était géniale, avec un présentateur de télé-achat – en français – qui fait son laius avant qu’on entende la déflagration d’un écran de TV qu’on explose, même chose lors d’un speech d’Obama… et le morceau démarre sur fond d’interférences hertziennes.

Lorsqu’arrive le moment de “Goodbye Cruel World”, Roger, éclairé par un spot dans son dos,  chante les quelques lignes depuis le seul espace non comblé par une brique, et lorsque celle ci se met enfin en place, c’est l’entracte.

Sur l’écran défilent des photos et des noms d’hommes et femmes morts au combats, des anonymes qui ne le sont plus, des figures historiques comme Gandhi, Neda Soultani et même un certain Eric Fletcher Waters. Roger avait lancé l’idée via son site internet, et ses fans on répondu en masse. Très bel hommage je trouve.

Une demi heure après le show reprend. On ne voit plus du tout le groupe alors qu’ils jouent le superbe “Hey You”, mais il semblerait que le fait de ne pas voir les musiciens trouble nos voisins qui en profitent pour parler. C’est très frustrant, et curieux à la fois. Sur “Is There Anobody Out There”, deux briques sont retirées pour qu’on voie Dave Kilminster et G.E. Smith jouer de la guitare.

Roger Waters est de nouveau devant le mur, tout à gauche de la scène, installé dans son fauteuil, avec sa lampe et sa TV, l’image forte nous rappelle le film, immanquablement. Là encore, vocalement, il interprète “Nobody Home” comme lui seul pourrait le faire, avec une justesse et une émotion qui font de The Wall ce qu’il est: autre chose qu’un simple album de rock. Alors même si c’est de l’overdub, c’est beau, et ça fait partie du spectacle.

Vient ensuite “Vera” avec des images émouvantes d’enfants en classe retrouvant leur père, probablement de retour d’Irak, puis on enchaîne directement sur “Bring the Boys Back Home”.

Roger est seul devant la scène, et, alors qu’on entend quelqu’un frapper à la porte de sa chambre, l’intro caractéristique de “Comfortably Numb” emplit Bercy, et Roger fait maintenant face au mur, qui s’agrandit avec un effet de perspective. C’est terriblement bon d’entendre ce “Hello, is there anobody out there ?” chanté par Roger. Beaucoup la reprennent, avec plus ou moins de succès, mais “Comfortably Numb”, c’est la voix de Roger, aussi.

Mais…sur le refrain, on se rend compte que c’est aussi la voix de Gilmour, et on s’en rend compte par défaut justement. Le choriste s’en sort très bien, mais…ce n’est pas pareil… et même chose pour le solo Dave Kilminster est vraiment excellent, et interprète vraiment bien ce passage, mais il manque le toucher “Gilmour” qui est tout aussi inégalable que le timbre “Waters”. Ne boudons pas notre plaisir: nous sommes devant The Wall, Waters à quelques mètres de nous s’appuie dessus, tente de le pousser, et Dave Kilminster est au sommet du mur, à une dizaine de mètre au dessus de la scène en train de faire son solo… Il y a quelques années j’aurais payé cher ne serait-ce que pour avoir l’espoir de voir ce spectacle un jour…

Sur le second solo, Waters pousse sur le mur et les projections le font éclater en morceaux, révélant un coucher de soleil coloré derrière, l’effet produit est magnifique. Mais le mur n’est pas tombé.
Pendant “The Show Must Go On”, les hommes en noirs investissent à nouveau la scène, apportent du matériel devant le mur: claviers, batterie, guitares, basse. Deux portes étendards se placent de chaque côté de la scène, et Roger revêt un long manteau de cuir noir, des gants noirs, de grosses lunettes noires. L’arrière plan représente des colonnes, qui sont ornées de drapeaux lorsque commence “In The Flesh”. L’occasion de parler du son d’ailleurs : c’est Bercy, c’est une salle énorme, et on est juste devant la scène: le son est nickel. La spatialisation aussi d’ailleurs, on se surprend parfois à se retourner quelque fois qu’un avion nous tombe sur la tronche. C’est un show réglé au quart de poil, qui laisse certes peu de place à l’improvisation, mais bon, c’est The Wall, et c’est un réel plaisir de se retrouvé immergé de la sorte dans ce spectacle.

Waters dédie le prochain morceau aux paranos du public, c’est “Run Like Hell”, ambiance pointage du doigt, projecteur et mitraillette. Roger exécute son public, qu’il soit gay, juif ou qu’il ait des boutons… et on en redemande. Les projections sur le mur son tout simplement géniales. Réminiscence Orwellienne de “Animals” avec des cochons humanoïdes et le slogan “Ilead”, des chiens avec des écouteurs blancs dans les oreilles et “Iprotect” et les moutons, pareillement dessinés avec “IFollow”. Terriblement bon, tout comme l’utilisation de la vidéo scandale de l’armée américaine avec le drone qui filme deux journalistes en Irak, et la voix du supérieur qui ordonne de les allumer, ils portent des armes…

Des vers de terre géants enlacent les colonnes et Roger a pris son porte voix sur “Waiting For The Worms”. Derrière lui, les marteaux marchent au pas, nous sommes en plein dans le délire de Pink, ça fait froid dans le dos. Et puis… “Stop”, la poupée de chiffons est éclairée, au sommet du mur, avant de chuter. Tout s’arrête pour laisser place au procès de Pink où Roger se met sur le côté, laissant la place aux projections issues du film, mêlées avec d’autres réalisées pour l’occasion. Le son se charge de basses de plus en plus, le sol tremble sous nos pieds, le public scande “Break The Wall”, poing levé. On sait ce qui va arriver, on commence à se dire que, oui, quand même, il est haut ce mur… et après un crescendo stressant, le mur tombe enfin, un mouvement des premiers rangs nous pousse vers l’arrière alors que le mur s’écroule dans un fracas assourdissant.

Après quelques instants, le groupe au complet vient au devant de la scène, à la file indienne au milieu des vestiges du mur. Equipés de mandolines, de ukulelés ou d’une trompette pour Roger, ils interprètent “Outside The Wall”. Waters remercie sincèrement le public, puis en guise de sortie, présente ses musiciens un par un, avant de quitter les lieux à son tour, sourire toujours aux lèvres.

Un spectacle à la hauteur de ses ambitions. Même si ça n’est plus la même chose qu’en 1980, et ça ne pourra jamais être le cas, c’est quand même une chance inouïe de pouvoir, nous, la nouvelle génération, découvrir en live ce spectacle intemporel, interprété avec passion par Waters et ses musiciens. Le revers de la médaille bien sur, c’est la part laissée à la musique proprement dite: pas d’improvisation, pas de mise en avant des musiciens, malgré une interprétation irréprochable, et pas mal de playback de la part de Waters. On est plus proche du spectacle que du véritable concert mais cela valait le déplacement, et plutôt deux fois qu’une !

Merci à ma femme pour ces concerts, ainsi qu’à mes beaux parents…

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Commentaires 2
  1. je viens de lire le compte rendu j’ai eu l’impression d’être un peu à Bercy les phots sont belles Monsieur le photographe c’est du beau travail merci bises

  2. C’est vrai qu’on s’y croit vraiment ! A chaque fois ton écriture me transporte et tes photos sont géniales… Merciiiii !

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